Etant une grande amatrice de clips
malgaches de tous les genres, comme beaucoup sans doute, je me suis aperçue
d’un phénomène de plus en plus grandissant : la provocation de la part des
artistes. Que ce soit du côté vestimentaire, des paroles ou encore du scénario,
on voit aujourd’hui que les malgaches ont de moins à moins de pudeur et font dans la provoc', que ce soit à travers les gestes ou les vêtements. Bien entendu, ce sont surtout les femmes et les
jeunes filles qui sont concernées par ce phénomène d'hypersexualisation.
Légende: Capture d'écran du clip "Samby tia", de la chanteuse Arnaah, dont la sortie sur Youtube a suscité de vifs débats, notamment à cause de ses tenues jugées "trop osées"
Les chanteuses tropicales souvent pointées du doigt
Autant ne pas y aller par quatre
chemins : ce sont surtout les chanteuses tropicales qui ont tendance à
être pointées du doigt lorsqu’on parle de provocation. Selon une analyse toute
personnelle, 90% au moins d’entre elles ont déjà figuré en tenue jugée
« provocante » dans un vidéo clip, se trémoussant joyeusement au
rythme d’une musique endiablée. Si certaines se contentent de porter une robe
un brin trop courte, d’autres n’hésitent pas à carrément enlever la robe et à
ne défiler qu’avec ce qu’il y a dessous. Je me souviens particulièrement d’un
clip qui a fait un tollé général à sa sortie, la jeune chanteuse arborant des
tenues très légères et mettant en valeur son fessier très peu recouvert à force
de sauts et de coups de reins aguicheurs. Coquin n’est-il pas ? Mais
aujourd’hui, se mettre quasiment à oilpé dans un clip n’est pas réservé qu’à la
musique « mafana ». En effet, de plus en plus de chanteurs(ses) RNB,
Dance hall, etc.… N’hésitent pas à prendre des danseuses et figurantes qui n’ont
pas froid aux yeux, et je dirais même plus pas froid tout court au vu de la
légèreté de leurs tenues (en même temps, le twerk est connu pour ses vertus en
tant que source de chaleur) pour les faire danser de manière toujours de moins
en moins conventionnelle. Bien entendu, il y a aussi les scénarios provocants
et les mises en scène que personne n’aura osé faire passer dans une chaîne
malgache il y a encore quelques années.
Se dénuder : une évolution de la société ou une stratégie marketing ?
A la vue de ses chairs bien galbés
exhibées sans pudeur aucune au petit écran, beaucoup s’insurgent : « Où
est passé la pudeur ? » « N’a-t-elle pas de père ni de frères ? »
« C’est à l’encontre de la culture malgache ! » « C’est de
la prostitution ! » - Tels sont les arguments les plus souvent
évoqués par ceux qui n’approuvent pas. Les autres, par contre, arguent
que c’est pure hypocrisie de critiquer les artistes malgaches qui le font alors
que quand ce sont des stars comme Beyoncé ou encore Jennifer Lopez, on ne fait
pas preuve du même esprit critique. D’autres encore pensent que c’est dans « démodé »
de s’insurger pour une absence de jupe ou pour un décolleté (trop) profond dans
un clip... « Hé, après tout, on est en 2017 ! » affirment-ils,
un brin moqueurs envers ces culs serrés qui ne comprennent rien aux clips des
jeunes qui ont le swagg… Il est vrai qu’on est loin des années où le corps de
la femme, jugé avec méfiance, devait être caché sous une jupe longue bien sage
et des chemisiers au col boutonné au ras du cou. Aujourd’hui, la beauté féminine,
plus encore, son pouvoir sexuel, est reconnu. L’industrie de la musique et du
cinéma (à ne citer qu’eux), l’ont bien compris et s’en servent pour nous
bombarder d’images de starlette sexy, qui s’assument, qui sont « heureuses » !
Et c’est une stratégie marketing qui marche : plus il y a de la
provocation et de la chair nue, plus il y a des chances de se faire voir et de
vendre. Si faire l’apologie du corps de la femme est louable, il est cependant
indéniable que l’industrie du divertissement a des intentions moins innocentes. A l’échelle
mondiale, une étude a prouvé que le nombre de vidéos « provocantes » est
en augmentation à cause des études en marketing qui ont démontré que les
adolescents contrôlaient le portefeuille familial. L'industrie sait
qu'elle fera de l'argent en les ciblant. A Madagascar, on aime bien « être
dans le coup », « faire comme tout le monde » et hop, c’est
comme ça qu’on se retrouve maintenant à regarder d’innombrables clips dont certains
frisent l’obscénité.
Où va-t-on ?
Entant que revendicatrice acharnée du droit de la femme, je
ne suis absolument pas contre le fait qu’elle puisse disposer de son corps
comme bon lui semble. C’est parfaitement sain, puisque cela nous permet de nous
épanouir, à condition de faire fi des diktats insensés de la mode. Mais selon
moi, il faut garder en tête cette citation de Simone de Beauvoir : «
Une femme libre est exactement le
contraire d’une femme légère ». Se dénuder à la télé, offrir son corps
au regard du monde, cela peut entrainer à véhiculer le message que pour être beau et connu, il faut être un objet
sexuel. On ne valorise que l'aspect sexuel de l'être humain, oubliant les
autres caractéristiques, dont l'intelligence, la discussion. Et de plus en plus
de jeunes malgaches, filles ou garçons, se définiront de plus en plus par leur
potentiel de séduction, et non par leurs véritables atouts. En outre, en dehors
de considérations culturelles, il faut également penser au fait que cette hyper
sexualisation des femmes dans les médias conduit à faire de l’apparence
physique le seul passeport pour une vie meilleure. Si les artistes malgaches,
en particulier les femmes, veulent faire des clips « modernes », il
faut se trouver vers d’autres méthodes que celle du nudisme. Et ce n’est
vraiment pas faute de talent, nombreuses sont celles qui ont une réelle fibre
artistique et la diversité de nos cultures (tortiller du fessier, on le fait
depuis longtemps, quand le mot twerk n’existait même pas !) fait de notre
île un véritable gisement d’art. Il ne reste plus qu’à l’exploiter comme il
faut…
Pela
si la dernière question de cet article est où-va-t'on? Je dirai que nous allons directement en enfer!
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