Préparation à la vie conjugale: cas des femmes malgaches
Pela
octobre 15, 2018
0 Comments
Le
mariage fait partie des évènements les plus importants dans la société
malgache, et ce, dans toutes les régions. Traditionnellement, les malgaches n’allaient
ni à la mairie ni à l’église pour officialiser cette union. La cérémonie se fait
entre les deux familles, essentiellement pour permettre à l’homme de demander
la main de sa future épouse à sa belle-famille. En fonction des ethnies et des
régions, les traditions peuvent varier mais il est important de noter qu’avant
l’entrée du christianisme à Madagascar, le mariage malgache était très
différent du mariage tel qu’il est conçu dans les sociétés européennes.
En
effet, le mariage n'était ni un sacrement ni un pacte légal qui établit entre
les époux un double lien religieux et civil[1]. Pour nous autres
malgaches, le mariage était traditionnellement un accord purement verbal (il
n'y a pas de document à signer), une association de deux contractants résultant
du simple échange de volontés requises par la coutume.
Mariage malgache : rétrospective
Il
est important de noter que la beauté morale de virginité et de la chasteté, tel
qu'il est conçu par les sociétés européennes, n'avait aucune importance pour
les Malgaches, contrairement à ce que certaines personnes s'évertuent à croire
afin de faire culpabiliser les jeunes filles malgaches qui ont aujourd'hui plus
de liberté sexuelle (oui, je vise). A l'époque, les parents laissaient les jeune
filles, dès lors qu'elles étaient pubères à suivre leurs inclinaisons, les
relations sexuelles étant considérées comme acte tout à fait naturel et
nullement répréhensible.
Pour
le cas de quelques clans du Sud-est de Madagascar cependant, les parents
étaient plus exigeants quant à la "vertu" des jeunes filles. En tout
cas, de manière générale, le mariage est considéré comme le commencement de la
vie de la femme au lieu d'en être la fin.
La préparation des
jeunes filles au mariage dans le Madagascar aujourd'hui
Actuellement,
les malgaches continuent d'accorder une grande importance au mariage même si
avec l'influence du christianisme et des autres cultures, certaines traditions
sont passées à la trappe. La virginité et la vertu des jeunes filles ont revêtu
une importance singulière, même si ce n'est pas obligatoire pour conclure une
union maritale.
Pour
ce qui est de l'éducation avant le mariage, les jeunes filles malgaches, outre
la scolarisation, reçoivent également tout ce qu'il y a à savoir pour devenir
une bonne épouse. Cela va de l'ensemble des tâches ménagères (vaisselle,
repassage, cuisine, entretien de la maison... Bref, la panoplie de la fée du
logis), aux valeurs morales. Et parmi ces dernières, il y a le fameux
"fandeferana" (dont j'ai parlé ici), qui doit leur permettre
d'anticiper le fait que leur mari pourra leur faire quelques infidélités ou
toute autre crasse.
Soit,
tout cela part d'une bonne intention: celui de permettre à l'épouse de bien
gérer son foyer et d'avoir un mariage qui dure. Mais d'un autre côté, on la
fait entrer dans ce moule étriqué de la "mère au foyer" qui DOIT
jouer le rôle du robot ménager multi-fonction et de la poupée sexuelle
gonflable (et j'exagère à peine, ayant moi-même eu droit au laïus du "Si
ton mari veut faire l'amour et que toi tu ne veux pas, tu dois quand-même
accepter sinon il va aller voir ailleurs. N'oublie pas, plein de jeunes filles
n'attendent que ça! Alors donne un peu du tien ce n'est qu'un petit moment
gênant à passer).
De
leur côté, les garçons n’ont, à ma connaissance, pas droit à ce genre de « formation »
qui les prépare à devenir des époux modèles. Et l’on s’étonne encore que jusqu’en
2018, on a droit à un taux élevé de violences conjugales et d’abandons de foyer
par ces messieurs. Attention, je ne dis pas que les hommes n’en sont pas
eux-mêmes victimes. Non, mon avis est que garçon ou fille, chacun doit être
éduqué au respect de l’autre et non à être seulement un robot qui veille au bon
déroulement du ménage. Au lieu de convaincre la fille qu’elle doit à tout prix
veiller à être une femme « respectable » sous peine d’être humiliée
et de jeter l’opprobre sur sa famille, il vaut mieux lui rappeler qu’elle a une
voix et qu’elle a tout à fait le droit de s’en servir.
Oui,
une vie de couple n’est jamais exempte de coups durs et de moments difficiles
mais cela n’est pas une raison de placer la femme (ni qui que ce soit d’autre d’ailleurs)
dans la position de soumise pour que l’union marche. Car Madagascar fait encore
partie de ces pays où de facto, ou être une « bonne épouse » rime
avec « une bonne soumise ».
Sources :
[1] Le mariage à Madagascar, G.
Grandidier, Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris Année 1913
4-1 pp. 9-46